Le nouveau permis de travail unique


Posté par Philippe Descheemaecker le 20 décembre 2018

La Belgique a enfin décidé de transposer la directive européenne 2011/98/CE du 13 décembre 2011 : à partir du 3 janvier 2019, les ressortissants de pays tiers, donc hors Europe, souhaitant travailler en Belgique plus de 90 jours pourront introduire auprès de la Région compétente une demande unique valant demande d'autorisation de travail et demande d'autorisation de séjour (Arrêté royal du 12/11/2018 modifiant l'arrêté royal du 08/10/1981 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers).

L’Etat belge ressort donc sa politique de régularisation via le contrat de travail, politique qu’il avait déjà mis en vigueur lors des précédentes lois de régularisation (loi de régularisation du 22 décembre 1999 et instructions du gouvernement du 19 juillet 2009).

Voilà donc une bonne nouvelle pour tous les étrangers non européens qu’un employeur belge veut engager mais qui ne pouvait le faire étant donné la situation irrégulière de l’étranger.

La demande est introduite par l’employeur auprès de la Région. Si la Région accorde l’autorisation, elle transmet le dossier à l’Office des Etrangers. La Région et l’Office ont 4 mois pour prendre leur décision.

Il faut toujours démontrer qu’il n’est pas possible de trouver un travailleur apte sur le marché de l’emploi. D’après le site de la Région de Bruxelles-Capitale, il faut aussi et en principe que la Belgique soit liée par un accord d’occupation international avec le pays du travailleur.

Les documents à produire sont les suivants :

  • une copie du passeport ou du titre de voyage en tenant lieu en cours de validité,
  • la preuve que le travailleur dispose de moyens de subsistance suffisants, la durée de son occupation en tant que travailleur, et, le cas échéant, le numéro de TVA de l'employeur,
  • un extrait de son casier judiciaire ou un document équivalent,
  • un certificat médical,
  • une assurance maladie couvrant l'ensemble des risques en Belgique pour lui-même et les membres de sa famille.

Les titres de séjour qui seront délivrés porteront une mention relative à l'accès au marché du travail :

  • « Marché du travail : limité »
  • « Marché du travail : illimité »
  • « Marché du travail : non »

L’Ordonnance bruxelloise relative à l’hébergement touristique : quand la volonté d’éviter les excès devient excessive


Posté par Philippe Descheemaecker le 17 août 2016

La logorrhée législative n’ayant pas de limites (le Moniteur Belge a dépassé les 82.000 pages en 2015 alors qu’elles n’étaient que de 14.000 en 1981 – cf. l’article de Mr. Régnier Hoegelesteen, "L’abus de lois, ou l’état liberticide", LB du 9 août 2016), il fallait que notre législateur, ici bruxellois, s’attaque à un emblème de l’économie participative ou collaborative, je veux parler ici des plateformes de type Airbnb, sous couvert de coordonner les différentes offres 'hôtelières' à Bruxelles.

Le titre du texte de loi s’intitule "Ordonnance relative à l’hébergement touristique " et a été voté par le gouvernement bruxellois le 8 mai 2014. Il a été validé par un Arrêté d’exécution du 24 mars 2016.

Si les raisons sont louables (combattre la pratique consistant à retirer son appartement du circuit classique de la location pour le réserver aux touristes [1], protéger le marché hôtelier qui souffre de la concurrence déloyale, manque à gagner fiscal pour les collectivités,...) et si, ce faisant, Bruxelles rejoint la plupart des grandes villes européennes qui ont légiféré en la matière [2], on peut regretter l’inanité de certains articles, de même que l’absurdité de certaines conditions imposées en fonction du type d’hébergement touristique proposé.

Tout d’abord, pour éclairer votre lanterne, le texte prévoit 6 types d’hébergement :

  • les hôtels (article 6)
  • les appart-hôtels (article 7)
  • les résidences de tourisme (articles 8 et 9)
  • les hébergements chez l'habitant (articles 10 et 11)
  • les centres d'hébergement de tourisme social (article 12)
  • les terrains de camping (article 13)

Je passe sur les conditions générales que toute "exploitation d’une hébergement touristique " doit remplir (article 5), pour relever quelques pépites savoureuses au niveau des conditions spécifiques.
Ainsi, dans les hôtels et appart-hôtels, "les espaces communs accessibles aux touristes sont pourvus d'un éclairage suffisant et peuvent être aérés " (article 6, §1er, 5° et article 7, §1er, 4°) : quid s’ils ne sont pas aérés ? L’utilisation du verbe 'pouvoir' signifie qu’il n’est pas obligé qu’ils le soient ? Si tel est le cas, pourquoi le spécifier ? Même remarque dans l’Arrêté du gouvernement du 24 mars 2016 portant exécution de l’ordonnance : "L’hôtel dispose d’un espace... où il y a possibilité d’obtenir des consommations sans obligation de consommer " (annexe 1, point 25). S’il y a possibilité, inutile de préciser que c’est sans obligation...

Dans le cas des résidences de tourisme (en gros et pour le dire clairement, les fameux 'gîtes'), il est écrit que l'exploitant "s'engage, par son hospitalité et sa disponibilité, à contribuer au déroulement d'un séjour agréable et chaleureux " (article 9) : est-ce le rôle du législateur de prévoir que la crémière doit sourire quand elle vend son pot de crème ? Faut-il payer un homme de loi pour dire à l’exploitant Tartempion qu’il doit être gentil avec la clientèle ?

En ce qui concerne les hébergements chez l’habitant – nous y voilà : les fameuses plateformes comme Airbnb, Wimdu ou 9flats – on trouve des conditions relatives à l’exploitant et d’autres relatives à l’établissement.
L’exploitant ne peut exploiter plus d’un établissement d’hébergement (en outre, cela doit être sa résidence principale) et ne peut y accueillir plus de quinze touristes en même temps. Jusque-là, tout va bien, c’est assez clair. Cela se complique quand on arrive aux conditions relatives à l’établissement. On trouve d’abord des phrase sublimes, du style "l’établissement doit comporter d'une à cinq chambres au plus d'hôtes " (article 10, 2°, b). En faisant un effort, on arrive à comprendre que l’établissement ne peut comporter plus de cinq chambres mises à la disposition des touristes mais si l’on combine ces 5 chambres avec le maximum de 15 touristes, ne va-t-on pas à l’encontre du but poursuivi, qui est de limiter le nombre de visiteurs faisant appel à ce type de plateforme par rapport aux hôtels ou autres hébergements classiques ? La question mérite d’être posée, d’autant plus qu’il y a une autre condition qui semble paradoxale : "l’établissement doit... être disponible pour accueillir des hôtes au moins quatre mois par an " (article 10, 2°, c) alors que la plupart des villes européennes confrontées au phénomène des plateformes touristique ont légiféré dans le sens contraire... (cf. note 2 en bas de page).

Dans l’Arrêté du gouvernement du 24 mars 2016 portant exécution de l’ordonnance, on frise le grotesque : figurez-vous que si vous exploitez une résidence de tourisme ou souhaitez louer une chambre chez vous via l’une ou l’autre plateforme, vous devez prévoir une penderie ou une commode où "au moins deux cintres par personne sont disponibles " (annexe 3, point 9,e et annexe 4, point 11,a). Il est signalé aussi que le coin w.c. doit disposer, outre d’"un siège avec lunette et rinçage " et de "papier toilette ", d’au "minimum 1 rouleau de réserve non entamé " (annexe 3, point 19 – annexe 4, point 15), sans oublier le "gobelet ou verre par client logeant " dans la salle-de-bain (annexe 4, point 13,g). On croit rêver... On vous dit aussi que "les sanitaires communs font l’objet d’un entretien quotidien " mais, là par contre, on ne dit pas par qui (annexe 4, point 22).

Je garde le meilleur pour la fin : la dernière annexe de l’Arrêté du gouvernement précité, l’annexe 6, concerne les "conditions d’exploitation complémentaire pour les établissements d’hébergement touristique de la catégorie 'terrain de camping' ". Vous y trouverez, entre autre, toute une série de clauses relatives aux sanitaires communs. Cela se termine comme ceci : "Le nombre de sanitaires pour hommes et femmes est réparti de manière. " (article 6, in fine), punt aan de lijn. Sans doute que notre bonhomme, fatigué par tant de détails éminemment superflus à l’ère des réseaux sociaux, s’est-il endormi avant d’avoir terminé sa phrase, le plus inquiétant n’étant pas le fait que personne n’ait relu son texte mais qu’il n’ait pas pensé à condenser cet énorme salmigondis.

Je ne suis pas un féru de l’époque napoléonienne mais son Code civil était quand même un petit bijou de concision. Nos élus devraient en prendre de la graine.

CLIQUEZ ICI pour obtenir la liste des documents à réunir et la procédure à suivre pour être enregistré et autorisé à exploiter un hébergement touristique.


[1] A Berlin, 10.000 appartements ont été retirés du marché locatif à cause de la plateforme Airbnb ; à Paris, les 1er, 4ème et 6ème arrondissements, parmi les plus prisés des touristes, perdent des habitants.

[2] A Berlin, depuis le 1er mai 2016, un propriétaire ne pourra plus louer qu’une seule pièce de son appartement ; à Paris, depuis le 1er octobre 2015, Airbnb collecte la taxe de séjour – 83 centimes par nuitée – et la reverse à la Ville de Paris ; à Barcelone, les propriétaires doivent s’acquitter d’une taxe de 65 centimes d’euros par nuit ; la location de logements entiers est interdite : deux chambres maximum peuvent être louées, en présence du propriétaire, quatre mois par an maximum (source : le Monde).

Rappel de quelques principes et règles en matière de marchés publics


Posté par Philippe Descheemaecker le 20 mai 2016

Après trois mois d’absence, je reviens avec ma nouvelle Newsletter. Ce mois-ci, je souhaite vous rappeler quelques règles en matière de marchés publics, ce qui ne va évidemment pas intéresser tout le monde. Pour ceux-là, je serai de retour le mois prochain avec un article sur les écueils à éviter en cas de rénovation d’un immeuble.


Les principes généraux

1. Le principe du forfait

En vertu de ce principe, tous les marchés publics sont passés à forfait, même dans le cas d’un marché à "bordereau de prix" (l’on considère en effet que les prix unitaires des différents postes sont forfaitaires).

Il y a une atténuation et deux exceptions :

  • le mécanisme de révision des prix est une atténuation du principe du forfait,
  • un marché public peut être passé sans fixation forfaitaire des prix i) lorsque les travaux sont particulièrement complexes (par exemple, mise en œuvre de techniques nouvelles), ii) en cas de circonstances extraordinaires et imprévisibles (par exemple, en cas d’urgence).

2. Le principe du service fait et accepté

En vertu de ce principe, tout paiement ne peut être effectué qu’après exécution d’une prestation et acceptation de celle-ci par le pouvoir adjudicateur.


Les règles de paiements

1. Les préalables au paiement

L’entrepreneur est tenu d’introduire une déclaration de créance et un état détaillé des travaux réalisés (dit "état d’avancement") justifiant la déclaration de créance.

2. Délai de vérification

A partir de la date de réception de la déclaration de créance, le pouvoir adjudicateur dispose d’un délai de 30 jours pour vérifier l’état d’avancement, dresser un procès-verbal mentionnant les travaux acceptés et le montant qu’il estime dû, et communiquer le tout à l’entrepreneur. L’entrepreneur a alors 5 jours pour introduire sa facture.

3. Le délai de paiement

Le paiement du montant dû doit être effectué :

  • dans un délai de 30 jours à compter de la date de la fin de la phase de vérification,
  • dans un délai de 60 jours à compter de la même date pour les marchés passés par des pouvoirs adjudicateurs qui dispensent des soins de santé.

Les conséquences d'un retard de paiement

1. Les intérêts de retard

En cas de retard de paiement, l’adjudicataire a droit au paiement d’un intérêt au prorata du nombre de jours de retard, dont le taux est fixé en fonction d’un taux appliqué par la Banque centrale européenne majoré de 8 %.

2. Les frais de recouvrement

En outre, l’adjudicataire a droit au paiement d’une indemnité forfaitaire de 40€ pour les frais de recouvrement. Il peut également réclamer une indemnisation raisonnable pour tous les autres frais qu’il doit engager, comme par exemple les dépenses engagées pour faire appel à un avocat.

3. Interruption ou ralentissement du chantier

Lorsque, par la faute du pouvoir adjudicateur, le paiement n’a pas été effectué dans les 30 jours de l’échéance du délai de paiement (cf. supra), l’adjudicataire peut ralentir le rythme d’exécution des travaux ou interrompre ceux-ci à la condition qu’il notifie sa décision au moins 15 jours avant le ralentissement ou l’interruption des travaux. Dans ce cas, l’adjudicataire aura droit à une prolongation de délai égale au nombre de jours compris entre l’échéance du délai de paiement et la date du paiement effectif, ainsi qu’à une indemnisation.


Pour le mot de la fin, je vous livre ci-dessous le tableau des seuils de publicité applicables depuis le 1er janvier 2016

Marché Publicité belge Publicité belge et européenne
Fournitures < 135.000€ HTVA > 135.000€ HTVA
Services < 135.000€ HTVA > 135.000€ HTVA
Services annexe 2B (e.a. transport ferroviaire et par eau) Tout montant HTVA > 209.000€ HTVA
Services de télécommunications et services de recherche et de développement < 209.000€ HTVA > 209.000€ HTVA

NB l’administration ou la personne morale de droit public peut passer par la procédure négociée sans publicité pour tout marché dont le montant ne dépasse pas 8500€ HTVA.

Le contrôle du Juge en matière d’urbanisme ou d’environnement – application du principe de proportionnalité


Posté par Philippe Descheemaecker le 18 janvier 2016

Le mois dernier, je vous ai parlé du principe de la sécurité juridique qui permet au contribuable de déterminer, avec un degré minimal de prévisibilité, le régime fiscal auquel il sera soumis.

Je voudrais aujourd’hui vous parler d’un autre principe qui est de plus en plus appliqué par les juridictions : le principe de proportionnalité.

Deux exemples me viennent à l’esprit :

  1. Une commune estime que vous laissez votre immeuble à l’abandon. Elle demande à l’un de ses agents d’effectuer un constat et, quelques mois plus tard, vous recevez une taxe sur les immeubles inoccupés et/ou laissés à l’abandon, dont le montant, souvent exorbitant, est fonction du mètre courant par étage.
  2. Vous entamez des travaux de construction autorisés par un permis d’urbanisme mais oubliez d’envoyer la déclaration PEB avant le commencement de ceux-ci (cf. entre autre l’article 237/24, §2 du CWATUPE). Un procès-verbal est dressé et vous recevez une amende administrative dont les montants sont, en général, également très élevés.

Prenons comme hypothèse de départ que, dans les deux cas, vous êtes de bonne foi et n’avez commis aucune négligence manifeste. On peut ainsi imaginer, dans le premier cas, que vous avez introduit une demande de permis d’urbanisme mais que le bâtiment étant située dans un périmètre de sauvegarde du patrimoine, la procédure d’instruction est extrêmement longue (comptez entre un à deux ans à Bruxelles) ; tant que vous n’avez pas le permis, vous ne pouvez pas effectuer les travaux de rénovation afin d’enlever toute trace de vétusté. Dans le second cas, on peut imaginer que le responsable PEB, à qui vous aviez confié la charge d’envoyer la déclaration, a eu des problèmes de santé et dû être hospitalisé.

Malgré vos arguments (l’absurdité du système dans le premier cas, la force majeure dans le second), la commune refuse de retirer la taxe et en poursuit le recouvrement.

Vous êtes donc contraint de porter l’affaire devant les tribunaux et cela peut porter ses fruits.

En effet, le principe de proportionnalité "permet au juge de choisir la peine entre un minimum et un maximum, de tenir compte de circonstances atténuantes... en infligeant celle qu’il estime proportionnée à l’ensemble des éléments de la cause " [1]. Il peut de même invalider une mesure dans l’hypothèse où, effectuant ce contrôle, il constate que toute autorité raisonnable placée dans les mêmes circonstances "aurait estimé qu’il existait au moins une autre mesure moins attentatoire aux droits et aux intérêts du requérant qui, sans dégager l’ensemble des bénéfices attachés à l’objectif précis poursuivi par l’autorité administrative, réalise cependant une meilleure conciliation entre les intérêts opposés, un différentiel plus avantageux entre les bénéfices qu’elle génère et les préjudices qu’elle occasionne " [2].

Faisant application de ce principe dans le second exemple cité ci-dessus, le Tribunal de police de Namur a considéré "qu’il doit demeurer un rapport de proportionnalité entre les moyens développés et le but poursuivi ; que par ailleurs, compte tenu du contexte particulier qui a amené le responsable PEB à envoyer la déclaration avec retard, il y a lieu de réduire la sanction administrative à un minimum légal, soit à un montant de 250€ " [3].

Pour la petite histoire, la sanction infligée aux demandeurs du permis s’élevait à 8447€...


[1] C. const., 7 juin 2007, n°81/2007, B.8.1.

[2] S. Van Drooghenbroeck, La proportionnalité dans le droit de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, Prendre l’idée simple au sérieux, Publication de la FUSL, Bruxelles, Bruylant, 2001, p.211

[3] Civ. Namur, 30 avril 2015, Forum de l’immobilier, septembre 2015, n°4

Le principe de la sécurité juridique face à l’administration fiscale : comment la Cour constitutionnelle peut aider le contribuable en appliquant les grands principes de droit communautaire


Posté par Philippe Descheemaecker le 14 décemdre 2015

Vous êtes propriétaire d’un immeuble et louez un appartement. Vous avez pris soin de spécifier dans le contrat de bail que le locataire ne peut l’affecter en tout ou en partie à l’exercice d’une activité professionnelle. Ce dernier n’en a cure et déduit tous les mois, sans vous le dire, une partie de son loyer à titre de charge professionnelle.

Vous l’apprenez et pensez que le fisc pourrait alors se retourner contre vous et vous taxer sur la base du loyer réel perçu, au lieu de le faire sur la base du revenu cadastral de l’immeuble.

Dans un cas d’espèce soumis à la Cour constitutionnelle en 2010, le locataire avait fait l’objet d’une procédure de taxation d’office et l’administration fiscale avait admis qu’il déduise de sa base imposable le montant du loyer. Parallèlement, elle avait taxé le propriétaire sur la base du loyer réel avec effet rétroactif – en se fondant sur l’article 7 du C.I.R. 92 – alors que le contrat de bail interdisait clairement l’exercice d’une activité professionnelle.

La Cour a décidé que la taxation du propriétaire dans de telles circonstances portait une atteinte disproportionnée au droit du contribuable de pouvoir déterminer avec un degré minimal de prévisibilité le régime fiscal qui lui sera appliqué. Elle a également estimé que la loi devait être claire et précise et que les éléments constitutifs de l’impôt devaient être "définis en des termes suffisamment clairs et précis pour permettre au contribuable de déterminer le montant de l’impôt dû " (C.C., 30 mars 2010, n° 32/2010).

L’exigence de clarté et de prévisibilité est une application du principe de la sécurité juridique. Le fondement juridique de ce principe ne relève plus de notre droit, mais du droit de l’Union européenne et de la Convention européenne des droits de l’homme.

Comme tous les grands principes de droit communautaire, il prime sur le droit national des états membres de l’Union européenne.

Un entrepreneur qui bénéfice d’un accès à la profession pour certains travaux peut-il, sur le même chantier, effectuer d’autres travaux pour lesquels il n’en a pas ?


Posté par Philippe Descheemaecker le 30 novembre 2015

La loi du 15 décembre 1970 sur l'exercice des activités professionnelles P.M.E. et de l'artisanat [1] exige formellement l'accès à la profession dans le chef d'un entrepreneur.

Cette réglementation est d'ordre public.

La jurisprudence et la doctrine considèrent de manière unanime que la sanction légale de l'absence d'accès à la profession dans le chef d'un entrepreneur est la nullité du contrat d’entreprise. Cette nullité ne peut être rétroactivement modifiée par la délivrance ultérieure de l'accès à la profession légalement requis.

Cela va très loin puisqu’il importe peu que l'entrepreneur bénéficie de l'accès à la profession pour exercer une partie des travaux et qu’il n’en bénéficie pas pour exercer une autre partie des travaux.

C’est ce que la Cour d’Appel de Bruxelles a encore jugé dans un cas qui lui a été soumis en mai 2009 : "La nullité de l'ensemble de la convention s'impose même si le défaut d'accès à la profession n'affecte qu'une partie des travaux exécutés".

Il ne suffit donc pas à l'entrepreneur d'être titulaire d'un accès à la profession pour être automatiquement autorisé à exercer toute activité du domaine de la construction, car il n'existe pas d'habilitation générale.

La nullité de la convention implique, en principe, la remise des choses dans leur pristin état et la restitution réciproque, en nature ou par équivalant, des prestations exécutées.

Le maitre de l’ouvrage aura donc droit à la restitution des acomptes qu’il a déjà versés.
La restitution en faveur de l’entrepreneur ne peut se faire que par équivalant, sur la base de la valeur des travaux (matériaux et main d’œuvre), dont à déduire la marge bénéficiaire et le coût des éventuelles malfaçons.

Le juge conserve toutefois un pouvoir d’appréciation et peut refuser à l’entrepreneur tout ou partie des restitutions "si l’ordre social exige qu’il soit plus sévèrement sanctionné". Ainsi, dans une espère jugée par la Cour d’appel de Liège en janvier 2015, le juge avait amputé de 10% la restitution en faveur de l’entrepreneur (déjà amputée de la marge bénéficiaire et du coût des malfaçons) parce qu’il avait utilisé le papier à en-tête d’une société tierce et avait, en parfaite connaissance de cause, enfreint la loi.

Pour vérifier si votre entrepreneur a bien ses accès à la profession, allez sur le site de la Banque Carrefour des Entreprises, Public Search, et tapez le numéro de l’entreprise.


[1] Cf. aussi l’arrêté royal du 27 avril fixant les conditions d'exercice des activités professionnelles appartenant à la catégorie intersectorielle de la construction.

La carte Bleue européenne et le UK Visa, appelé "Tier 1 (Investor)" : deux autres manières d’obtenir le droit de séjourner en Belgique


Posté par Philippe Descheemaecker le 16 novembre 2015

Quand une personne de nationalité étrangère veut venir travailler en Belgique, il pense d’abord au permis de travail s’il est employé ou à la carte professionnelle s’il est indépendant.

Or, d’autres systèmes, un peu moins connus, existent. Ils requièrent des conditions très spécifiques qui peuvent intéresser des travailleurs très compétents ou très fortunés.

La carte bleue européenne

En 2009, l’Union Européenne a créé ce qu’on appelle la "Carte Bleue européenne" ou "Blue Card" visant à attirer une main-d’oeuvre hautement qualifiée provenant de pays extérieurs à l’UE.

La Carte Bleue européenne – pendant de la Green Card aux Etats-Unis – est un titre de séjour qui sert également de permis de travail. Elle permet au travailleur qui la détient de séjourner sur le territoire belge, mais aussi d’y travailler.

Il y a évidemment plusieurs conditions à l’octroi de cette carte (voir En savoir plus).

Le Tier 1 (Investor) UK Visa

Le Tier 1 (investor) Visa est destiné à des individus fortunés – non résidents CEE ou non résidents Suisse – qui veulent investir £ 2 millions ou plus en Grande-Bretagne. Cet investissement peut être fait en bons d’état, obligations, actions ou prêt dans le capital d’une société enregistrée en Grande-Bretagne.

Le premier visa qui est accordé est valable pour une période de trois ans et quatre mois.
Ensuite, on peut demander une extension pour deux ans supplémentaires.

Pour avoir droit à un "Tier 1 (investor) Visa", vous devez :

  • investir au moins £ 2 millions en Grande-Bretagne,
  • verser les fonds dans une institution financière valablement enregistrée,
  • être capable de prouver que l’argent vous appartient, à vous, votre conjoint, ou votre partenaire,
  • ouvrir un compte dans une banque anglaise.

En savoir plus